La stratégie RH de l’année pour réaliser 60 000 recrutements par an – Maud Alvarez-Pereyre

Vous vous demandez comment un groupe peut orchestrer plus de 60 000 recrutements par an ? Vous êtes curieux des actions à mettre en place pour booster la rétention des talents ?

De quoi parlons-nous dans cet épisode ?

Envie de plonger dans la gestion du stress en entreprise à travers les prismes culturels variés ?
Eh bien, ne cherchez pas plus loin ! J’ai la personne parfaite pour répondre à toutes ces questions : Maud Alvarez-Pereyre, une maman énergique de trois enfants, aux commandes de la transformation et des ressources humaines chez LVMH.

Au cœur de notre discussion avec Maud, découvrez :

Les défis uniques du secteur du retail, où pas moins de 55% du personnel de LVMH s’épanouit en magasin.

La stratégie ingénieuse derrière les 60 000 recrutements annuels du groupe, avec une attention particulière portée à l’attraction et à la rétention des talents, y compris des discussions sur diversité et inclusion.

Les nuances culturelles qui teintent la gestion du stress, mettant en lumière les différences entre l’Europe et les cultures anglo-saxonnes.

Préparez-vous à plonger dans les coulisses captivantes de la gestion des ressources humaines au sein de LVMH, où Maud partagera des astuces, des anecdotes et des réflexions sur la façon dont le groupe relève ces défis avec succès.

Prêt à lever le voile sur les secrets de l’univers RH chez LVMH ? 🚀

Thèmes abordés

  • Pourquoi assistons-nous à une augmentation du stress au travail ?
  • Les effets du travail à distance sur l’isolement et le collectif
  • La nécessité d’adapter les pratiques RH en fonction des étapes de vie des employés
  • Les stratégies pour gérer la charge mentale et l’équilibre vie pro vie perso
  • Les différences culturelles entre les États-Unis et l’Europe

Ressources que nous vous proposons : 

  • La semaine de quatre jours, comme vous n’en avez jamais entendu parler – Laurent de la Clergerie
  • Slow life : et si on prenait le temps de vivre ?
  • Réinventez votre leadership pour une meilleure santé au travail

À propos de ce podcast

« Stop à la charge mentale ! » est un podcast de Magaly Siméon, experte QVT, charge mentale et conciliation, produit par Lily facilite la vie.

💡 Comment soutenir efficacement les salariés face aux défis liés à la charge mentale ? Comment aborder de manière proactive, les questions de stress au travail au sein de votre organisation ? Comment maintenir un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, sans compromettre votre bien-être ? Ces questions cruciales trouvent leurs réponses dans chaque épisode  de « Stop à la charge mentale ».

Rejoignez-nous chaque semaine pour révolutionner votre approche du stress au travail. Nous explorons les conséquences du stress sur les entreprises, équilibrons vie professionnelle et vie personnelle, et mettons en avant la Qualité de Vie et des Conditions de travail (QVCT).

Que vous soyez manager, dirigeant, professionnel RH ou salarié en quête de réponses, ce podcast est votre rendez-vous hebdomadaire pour des solutions pratiques et une inspiration revigorante.

Vous n’avez pas le temps d’écouter l’épisode ? Lisez-le

Introduction

Magaly Siméon : Si vous avez envie de savoir comment on recrute 60 000 personnes par an, si vous avez envie de savoir comment mettre en place des actions concrètes pour améliorer la rétention dans l’entreprise, si vous voulez en savoir un peu plus sur la gestion du stress en Europe et dans les cultures anglo-saxonnes, alors cet épisode est fait pour vous. Je reçois Maud Alvarez-Pereyre, qui partage son parcours dans les fonctions RH au sein du groupe LVMH, un parcours international qui lui donne un éclairage particulièrement pertinent.

Bonne écoute. Bonjour Maud, bienvenue.

Maud Alvarez-Pereyre : Bonjour Mag, merci de me recevoir.

Magaly Siméon : Maud, est-ce que vous voulez bien vous présenter pour nos auditrices et nos auditeurs?

Maud Alvarez-Pereyre : Oui, bien sûr. Je suis Maud Alvarez-Pereyre. J’ai 43 ans, je suis mariée, maman de trois filles qui ont 15, 12 et 9 ans. Je suis en charge des questions ressources humaines et transformations pour le groupe LVMH. Ça fait 20 ans que je travaille pour le groupe où j’ai occupé différentes fonctions, toujours dans les ressources humaines, à la fois des fonctions opérationnelles en pays et en région, et des fonctions plus transversales pour les sièges. J’ai travaillé dans la beauté, dans les vins et spiritueux, dans la mode, et je suis retournée dans la beauté. Et depuis le mois d’avril, je suis au niveau du groupe LVMH, donc en central.

Les enjeux des RH en 2024 

Magaly Siméon : Merci. Alors ça vous donne quand même un parcours qui va sûrement vous aider à répondre à ma première question. Pour vous, en 2024, c’est quoi le ou les gros enjeux pour un RH ou une RH?

Maud Alvarez-Pereyre : Alors je vous réponds avec mon prisme LVMH, et vous l’aurez compris, c’est un peu ma spécialité parce que j’ai fait toute ma carrière dans le groupe. Ce n’est pas du tout avec la présomption que ce soit les préoccupations de tous les DRH. Nous, on est un groupe principalement de retail avec des gens qui travaillent en magasin et qui constituent 55 % de nos effectifs. Donc c’est vraiment le cœur de nos talents, et notre enjeu principal va être l’attraction et la rétention de ces talents. Chez LVMH, on se rend compte qu’il y a des attentes qui sont changeantes, que le COVID a accéléré le changement de donne avec des métiers qui sont difficiles, comme le retail. On travaille parfois six jours sur sept, les week-ends, tard, en prenant les transports en commun, on a un vrai problème d’attractivité. Donc je considère que notre métier, c’est de s’occuper du capital humain et de faire en sorte qu’on ait toujours les hommes et les femmes qui font tourner le business dans les années à venir. Aujourd’hui, ce n’est plus une certitude. Et je pense que pour nous, c’est probablement le plus grand facteur de risque à la croissance pérenne du groupe dans les années à venir, de ne pas trouver les personnes.

Oui, on recrute 60 000 personnes par an et on est d’abord un groupe familial qui a eu la chance de connaître une croissance exponentielle. Mais voilà, on se retrouve 20 ans après à gérer des effectifs énormes. On a 213 000 personnes dans le groupe et on apprend un petit peu en marchant avec des chiffres en termes de recrutement et de besoins de croissance de business qui sont conséquents et qui demandent donc à la fonction ressources humaines de se transformer. On est un métier vraiment en transformation profonde pour le moment. Je parlerais de transformation au niveau de la communauté. Se positionner par rapport au business : est-ce qu’on est dans l’influence ? C’est le premier point en termes de compétences et de développement pour retenir nos talents. Ça fait partie de notre métier. Et aussi comment on le transmet et qu’on transmet cette passion aux managers. Et puis le dernier point, c’est faire en sorte que tout le système soit vraiment cohérent, qu’on ait vraiment des incitations à la fois pour que les gens restent dans le groupe et que ce soit la stratégie la plus rationnelle plutôt que de partir ailleurs pour une augmentation de salaire et revenir après. Il faut qu’on arrive à bien les développer en interne et qu’on donne vraiment des récompenses aux managers qui font ça et qui passent du temps à développer les talents. C’est un gros changement parce que, comme beaucoup d’entreprises, on était plutôt focalisés sur le chiffre. On a d’ailleurs plutôt de bons résultats.

Magaly Siméon : D’accord. Donc ça veut dire que vous allez continuer de focaliser sur le chiffre, j’imagine, mais en ajoutant une dimension qui est finalement au niveau d’un manager, la capacité à animer son équipe et à être incité sur son turnover ?

La particularité chez LVMH 

Maud Alvarez-Pereyre : Son turnover, et j’avais presque envie de dire aussi sa capacité à les faire grandir, à les développer. Aujourd’hui, dans le groupe, on a une chance extraordinaire. On a six secteurs d’activité. On peut à peu près offrir toutes les évolutions de carrière possibles à nos collaborateurs. On fait beaucoup d’évolution de carrière. L’année dernière, on a eu 17 000 promotions. Après, quand on creuse dans les chiffres, on se rend compte que 90 % de ces promotions se passent dans la même maison, dans le même univers. Donc je me dis que si on arrive à commencer à croiser entre les maisons et les secteurs d’activité, on peut vraiment créer quelque chose qui est à la fois unique sur le marché. Donc vraiment un vrai avantage compétitif. Et en plus, avoir des gens qui connaissent vraiment bien le groupe, en termes de performance à long terme, je pense que ça améliorera nos chiffres aussi.

Magaly Siméon : Est-ce que vous avez déjà un ou deux exemples d’actions concrètes que vous avez menées dans ce sens-là et avez-vous des débuts de retour encourageants ?

Maud Alvarez-Pereyre : Alors oui, déjà, ça fait plusieurs années qu’on se focalise sur ces mouvements inter-maison sur vraiment le top 500 du groupe. On se rend compte que quand c’est le groupe qui planifie activement ces carrières, ouvre et donne de la perspective sur ce qui se passe dans d’autres métiers, au niveau de ce top 500, on n’est plus à 90 % de mouvements dans la même maison, mais seulement à 60 %. Et donc 40 % changent de maison ou de secteur d’activité. Si on arrive à le faire avec le top management aujourd’hui, vraiment notre challenge, c’est de le faire pour tout le monde, mais ça veut dire que c’est possible.

Et puis le deuxième, c’est un projet qu’on a en cours parce qu’on ne peut pas gérer 213 000 personnes comme on va gérer le top 500, ça ne marche pas, on ne peut pas les connaître individuellement, etc. Donc on est en train de lancer une talent marketplace qu’on teste sur deux fonctions. Une, qui est la tech parce que je me dis que les outils leur parlent. Et puis le deuxième, c’est parce que c’est vraiment un enjeu pour qu’on puisse utiliser, d’une part, les données et de l’autre, l’intelligence artificielle pour pouvoir pousser des jobs, des compétences dans la galaxie LVMH, et qu’on arrive justement à être transparent sur les opportunités et un peu incitatif sur la communication. On verra, le chemin est long. Les premiers tests sur l’intelligence artificielle ne sont pas toujours concluants, mais on savait que ça nous prendrait du temps. Donc on est vraiment déterminé à mener ce projet à bien.

La diversité et l’inclusion pour développer la marque employeur 

Magaly Siméon : Au niveau de votre groupe, la politique de diversité et d’inclusion, c’est aussi une façon de pouvoir recruter plus et retenir les gens. Est-ce que c’est un outil que vous utilisez ?

Maud Alvarez-Pereyre : Absolument. On l’utilise aussi de manière différente selon nos régions qui ont des compétences très différentes. On a, bien sûr, depuis plusieurs années, une patronne diversité et inclusion avec des politiques très actives, des groupes d’employés qui les mènent dans les différentes régions, et un certain nombre d’actions qui sont à la fois en termes de politique. Je pense que ça fait à peu près 15 ans qu’on travaille sur l’égalité des genres. On ne peut pas se priver de la majorité de la workforce de LVMH qui est constituée de femmes, pour qu’on ait une représentation des femmes à tous les niveaux de l’organisation. On a un engagement d’arriver à 50/50 en 2024 qu’on suit de très près.

Magaly Siméon : Et c’est quoi la politique LVMH, ça va être de travailler avec les femmes sur un certain nombre de problématiques communes, comme le self-marketing. Les femmes postulent principalement à des jobs qu’elles savent faire alors que les hommes postulent à des jobs du futur.

Vous le constatez encore aujourd’hui ?

Maud Alvarez-Pereyre : Oui, quand même. Je pense que sur le voice not really exprimant l’ambition. On a progressé après à tous les niveaux tout le temps. Non, c’est encore une question ou en tout cas, on la travaille systématiquement. Après, on a la question des carrières doubles, c’est-à-dire comment on fait pour que ce soit une carrière équilibrée quand il y a de l’expatriation et de prendre ça aussi en compte. C’est d’ailleurs de plus en plus les femmes qui mènent ces mouvements d’expatriation à l’international. Donc ça, c’est quelque chose. Mais aussi on a dû adapter nos politiques. On a des réseaux de femmes, on a des réseaux de coaching, on a un certain nombre d’événements. Et puis on a des chartes. On régénérera notre charte de la diversité avec tous au mois de mars, parce que ce sont des engagements forts. On est aussi sur le handicap, la diversité de couleur et la diversité sociale, et faire connaître les métiers du luxe et dire qu’en fait, c’est un groupe qui est accessible quand le luxe est vu comme exclusif pour nous, c’est très important parce qu’on n’est pas que les produits ou les publicités qu’on voit en magasin. Les métiers chez LVMH sont des métiers de terrain, c’est des gens qui travaillent à l’avant. C’est des gens qui travaillent sur le territoire français, dans les régions, dans les usines, et de temps en temps, on a besoin de casser cette image qui vient des publicités, des marques de mode que de la réalité de notre job tous les jours.

Les différences culturelles 

Magaly Siméon : Et justement, ce sont des gens de terrain. Entre autres, vous avez beaucoup de personnes en contact avec le public. Aujourd’hui, les services publics se plaignent de la relation avec le public. Quand je vais dans une boutique LVMH, ce n’est pas tout à fait le service public, mais est-ce que dans le retail et donc sur le terrain, ça devient plus compliqué ? La relation client est-elle génératrice de plus de stress qu’avant ?

Maud Alvarez-Pereyre : Oui, c’est très différent d’une géographie à l’autre. On va avoir, par exemple, des problèmes de violence aux États-Unis, comme le problème de vol en magasin, que ce soit à New York, à San Francisco. Les vols où on nous vide des étagères de Sephora, c’est problématique. Je ne peux pas dire qu’on a vraiment comme j’ai pu l’entendre dans d’autres organisations de l’agressivité des clients ou autres.

Et nous, à l’inverse, nous formons et avons formé quasiment toutes nos équipes retail à l’inclusion en magasin. C’est-à-dire que lorsque quelqu’un entre dans un magasin, nous ne jugeons pas par l’apparence. Nous ne jugeons pas par ce que les gens portent, mais nous prônons vraiment l’inclusion. Voilà, on sait que monter la rue et pousser la porte de l’un de nos magasins peut être intimidant. Moi-même, parfois, je ne me sens pas toujours à l’aise. Donc je pense que c’est quelque chose sur lequel il faut qu’on travaille pour que les gens se sentent accueillis dans ces environnements.

Magaly Siméon : On a un peu l’impression quand on lit aujourd’hui tout ce qui concerne le travail que c’est comme si c’était plus dur de travailler aujourd’hui qu’il y a 15 ans. Est-ce que vous ressentez, dans les équipes, le fait que les gens parlent plus de stress, ressentent plus de stress ? Est-ce quelque chose que vous percevez ?

Je pense que je le perçois dans les équipes et à titre individuel, moi personnellement, je le ressens beaucoup après le COVID. Je pense que ça a été une transformation, notamment dans la relation au temps. Aujourd’hui, on court en permanence après le temps. On émet un certain nombre d’hypothèses plus ou moins valables. Je pense qu’avant, pour organiser une réunion, on cherchait une salle de réunion. Il y avait un peu des contraintes physiques. Aujourd’hui, avec Zoom, on remplit les agendas sans problème de disponibilité. Et puis cette question d’instantanéité, cette demande d’accélération constante, est chez nous un facteur de stress. Je ne sais pas si c’est aussi parce que la croissance porte du stress, ou parce que parfois ça va moins bien dans nos maisons, mais on a l’impression que ce rapport au temps a changé en entreprise et que ça s’accélère. Il y a sans doute aussi un apport des technologies, des données, de nos manières de travailler aujourd’hui, de l’intelligence artificielle, de la vitesse à laquelle on peut écrire un mail. Si on commence tous à s’envoyer des mails qui sont tapés sur ChatGPT, je pense qu’on va vite exploser les capacités du cerveau humain.

Idées d’actions pour soulager la charge mentale 

Magaly Siméon : Et considérez-vous, ou avez-vous déjà, en tant qu’employeur, mis en place des choses pour essayer d’agir sur cette accélération ? Par exemple, sur l’intensité des réunions, sur les horaires ? Avez-vous des mesures pour essayer justement de calmer un peu le rythme ?

Maud Alvarez-Pereyre : Il y a plusieurs éléments. Je pense que d’être clair sur les priorités, pour nous, dans les équipes, c’est très important. C’est-à-dire que tout ne peut pas être une priorité. Il y a des choses urgentes, importantes, et il faut être aligné sur nos feuilles de route. Nous sommes dans un environnement créatif et entrepreneurial, chacun refait ses projets, recrée, etc. Mais qu’est-ce qui, à la fin, va vraiment avoir de l’impact ? Pour nous, c’est très important. Après, nous avons pas mal d’outils pour nos managers, qui sont différents selon les contextes. Aux États-Unis, nous avons beaucoup de questions de mentorat. Nous analysons l’impact du travail à distance, avec des gens parfois isolés, seuls, ce qui altère la relation au travail. Nous avons beaucoup de questions de dépression, de stress. Donc nous formons des équipes à détecter ce mal-être chez leurs collègues et à adopter les comportements adaptés. Nous avons aussi travaillé avec Arianna Huffington aux États-Unis sur Thrive, pour développer la capacité à gérer le stress et à entrer dans la vie des collaborateurs. Je pense que parfois les entreprises sont un peu timides par rapport à cela. Et en même temps, nous avons compris depuis longtemps qu’il n’y avait pas de mur entre la vie privée et la vie professionnelle, et qu’un collaborateur qui est bien, c’est quand même beaucoup mieux pour l’entreprise. Alors se dire : est-ce qu’on dort bien ? Est-ce qu’on regarde son téléphone jusqu’à 23 heures ? Est-ce que vous envoyez des emails à vos équipes depuis votre lit à 3h30 du matin et à 7h du matin ? Avoir vraiment cette discipline de vie est important, parce qu’on peut travailler tout le temps, partout, à une vitesse qui s’accélère, mais pour quel impact ? Et qu’est-ce qu’on fait des gains de productivité et de l’humain dans l’entreprise ?

Nous essayons différentes choses. Récemment, nous avons eu une conférence au siège sur la question « Est-ce qu’on travaille trop ? ». On a un programme appelé « Unfolding Tomorrow », et nous avons posé cette question : pourquoi travaillons-nous en fait ? Quel est le but du travail ? Moi, je trouve sincèrement que nous avons beaucoup de chance en tant que professionnels des ressources humaines de travailler exactement à ce moment-là, parce que nous touchons à des questions de société et d’humanité assez profondes, et nous réinventons cette relation entre les hommes, le travail et les entreprises.

L’importance de personnaliser les pratiques RH 

Magaly Siméon : Est-ce que vous percevez des différences de comportement chez les jeunes générations ? Est-ce qu’aujourd’hui vous êtes obligés d’avoir une gestion plus différenciée par tranche d’âge, plus personnalisée, ou est-ce que l’évolution des attentes gagne toute l’entreprise et tous les individus ?

Maud Alvarez-Pereyre : Je trouve ça assez drôle parce que finalement tout le monde parlait des générations Y et Z qui veulent travailler à la maison, mais ceux qui en profitent le plus, finalement, ce sont les trentenaires avec des enfants. C’est plus pratique pour eux. On se rend compte aussi que la génération de moins de 30 ans, qui habite souvent dans de petits appartements, n’a pas forcément envie de rester chez elle. Ils ont envie de voir leurs amis, de sortir après le travail. Finalement, cette tendance s’est un peu mixée entre les générations. Nous avons beaucoup de questions de managers sur comment gérer des attentes très différentes selon les âges de leurs équipes. Et c’est un sujet qui revient souvent. Je ne pense pas que tout le monde soit pareil au même âge. Par contre, nous ressentons un besoin d’adapter notre offre, quelque part comme on le fait pour nos clients en magasin. On ne vend pas le même sac à main à tout le monde. En ressources humaines, nous devons apprendre à faire de même, adapter nos offres aux moments de la vie des collaborateurs. Il y a des moments où on veut aller plus vite, des moments où on veut ralentir. Cette question de ralentir dans les carrières, d’avoir des moments de respiration, est essentielle. Il y a des questions de rémunération, d’aspiration. La seule chose que je perçois parfois comme un changement générationnel, c’est dans les motivations. Une génération valorisait la sécurité, le CDI, un grand groupe. La nouvelle génération veut apprendre et contribuer au monde. Savoir capter cette énergie pour la mettre au service de nos projets est vraiment un défi.

Magaly Siméon : Revenons à ce que vous disiez sur la personnalisation et le fait qu’il y a une vie personnelle et une vie professionnelle. Vous nous dites qu’aujourd’hui, en tant qu’entreprise et fonction RH, nous sommes obligés de prendre en compte que nos salariés ont des étapes dans leur vie qui ne sont pas toujours corrélées à l’âge, mais qui sont des étapes de vie, comme les premières années professionnelles ou le premier enfant, et qu’il faut les prendre en compte.

Maud Alvarez-Pereyre : On peut, mais après on perd des gens. Je pense que par rapport à ce que je disais au départ, on n’a plus le luxe de perdre des talents. La réalité, c’est que le talent coûte cher aujourd’hui. Si on veut garder les gens sur le long terme, il faut s’adapter. Nous sommes dans le luxe, nous comprenons le long terme pour nos marques et donc pour nos collaborateurs. Il y a des moments où il faut s’adapter un peu. Ce n’est pas simple, car nous sommes dans une culture de passionnés. Quand on est passionné, on a tendance à y passer des heures, du temps. Apporter cet équilibre, ces moments différents, n’est pas évident.

Magaly Siméon : J’avais l’impression que la culture américaine était plus ouverte à ce que l’employeur se mêle de la vie personnelle, comparé à la culture européenne. Est-ce la même chose ?

Maud Alvarez-Pereyre : Moi, j’ai une culture plutôt américaine et britannique. Pour nous, c’était assez logique, ou du moins naturel, de prendre l’individu dans son ensemble, de détecter ses besoins et de lui offrir un environnement sécurisant. Ils sont très business. Quand on veut de bons résultats business, il est rationnel de s’occuper de l’entièreté de l’être humain.

Dirigeante et charge mentale : des astuces 

Magaly Siméon : J’ai une dernière question pour la dirigeante et maman de trois enfants. On parle aussi de charge mentale dans ce podcast. Comment va la vôtre ? Avez-vous quelques astuces à partager pour qu’elle ne soit pas trop envahissante ?

Maud Alvarez-Pereyre : Concernant la charge mentale, il n’y a jamais de réponse permanente. Il y a des moments où ça monte et des moments où ça descend, c’est évident. Ma façon de gérer, c’est de la partager. Comprendre que nous sommes deux avec cette charge mentale, ça aide vraiment beaucoup. Ce n’est pas évident parce que déléguer signifie accepter que ce ne soit pas fait exactement comme on l’aurait fait. Par exemple, accepter que papa oublie parfois des sous-vêtements dans le sac de piscine. Il faut aussi accepter le regard de la société, qui peut être culpabilisant pour les mamans. En Angleterre, par exemple, c’est très normal de retourner travailler après avoir eu des enfants. En France, il y a encore beaucoup de travail à faire. Une maman m’a récemment dit : « C’est ton papa qui va vous chercher à l’école ? Vous êtes une famille moderne. » Nous sommes dans des grands groupes avec une culture de performance, donc accepter que ce ne soit pas parfait, c’est un long chemin. Il y a des moments où tout va bien, je fais du yoga, je cours, je mange sainement, je me couche à une heure raisonnable. Puis il y a des moments où c’est la semaine avant les vacances, et j’ai l’impression de sauver le monde, mais en fait, c’est juste de la fatigue. Il faut accepter que l’équilibre est fluctuant. La conciliation vie privée et vie professionnelle n’est jamais stable. À un moment de prise de poste, par exemple, il faut trouver un équilibre et l’accepter. C’est une quête permanente.

Magaly Siméon : Merci beaucoup pour cet échange, Magali. Merci beaucoup et merci pour tout ce que vous faites. C’est avec plaisir.

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